Discours et manipulation: les effets du discours

         J’ai l’habitude de dire à mes étudiants, et ceci n’est pas une nouveauté dans l’histoire de l’analyse du discours, que la force d’un discours réside dans le fait de faire croire à une audience une idée, sans émettre formellement l’idée en question. Exemple, à la place de dire Donald Trump est imprévisible, il est mieux de le montrer, de l’illustrer, et laisser l’audience déduire librement cette conclusion. Ceci passe par le jeu de l’implicite. Certains mots sont chargés et lourds de sens. Il y a une quinzaine d’années, Il était plus facile de dire qu’on est musulman que maintenant. Prenons un exemple : le prénom Hitler. Je suppose qu’il n’y a aucun parent aujourd’hui qui accepterait de donner ce prénom à son enfant. C’est vrai qu’en Allemagne, c’est légalement interdit (pour des raisons évidentes). Mais partout ailleurs, il y a une communauté discursive que nous partageons en tant qu’humains vivants dans un contexte global.

         Au niveau de la manipulation du discours à proprement parler, prenons l’expression état islamique, l’amalgame volontaire fait entre ce mot et Daesh (al-dawlah al-islāmiyya fi-l-ʿirāq wa-al-shām : État islamique en Irak et à Cham [Syrie]) fait de telle sorte qu'automatiquement tout état islamique (c’est-à-dire un état régi selon les lois islamiques) devient mal vu. Commençons par dire que les auteurs de Daesh sont les premiers à faire cette manipulation. Il n’est pas besoin de connaître l’Islam un peu pour voir la supercherie.  Quant à (ce) qui est derrière Daesh (sur un plan politique et historique) je m’épargne cette réflexion.

       Les médias auraient pu référer à ce groupe comme Daesh (comme le fait François Hollande, de temps en temps), ou le groupe armé État islamique, ou encore comme le soi-disant État islamique (comme Justin Trudeau). En l’appelant, dans les médias, l'état islamique (peut-être pour faire court), l’implication sur le plan psychologique, auprès du public, est : «  voici le modèle d’un état islamique », or Daesh (même s’il le réclame).

J’ai entendu récemment des voix s’élever qui disaient que « ce groupe terroriste n’a rien d’islamique ». Dans ce cas arrêtons de l’appeler l’État islamique !!!

Dalla Malé Fofana PhD